À partir de deux tableaux des collections du musée Denon « Le Conseil tenu par les rats » et « Le Rat retiré du monde » du peintre animalier chalonnais Philibert-Léon Couturier, l’exposition s’attache à décrypter les symboles liés à cet animal, source de répulsion et de fascination.
Une attention particulière est portée à la mise en relation entre sources artistiques et écrites [fables, contes et légendes].
Animal terrifiant au premier abord, ce rongeur fascine pourtant artistes et écrivains. Ses représentations évoluent d’une époque et d’une culture à l’autre.
Attribut des dieux durant l’Antiquité, lié à un destin funeste au Moyen-âge, l’usage de la figure du rat se popularise au XVIIe siècle dans les fables pour apparaître aujourd’hui dans des versions bien plus édulcorées. Des hordes de rats surgissant des flammes chez Hatto au Joueur de flûte de Hamelin version Disney, des descriptions fouillées proposées par Victor Hugo au traitement anthropomorphique des fabulistes, le muridé et ses images sont
prolifiques.
Le rat, animal « fabuleux »
Pour passer de l’Homme à l’animal, les fabulistes usent et abusent de l’allégorie animalière au service de leur message.
Le rat, aussi effrayant soit-il dans nos esprits ou dans ses représentations, est une des figures les plus charismatiques de la faune anthropomorphe de La Fontaine.
Organisé en société et symbolisant le peuple, le rongeur reflète le comportement et la psychologie de l’Homme ; parfois habile causeur mais souvent piètre exécuteur tel qu’il est dépeint dans le Conseil tenu par les rats ou Le Rat qui s’est retiré du monde .
J.J. Granville
Conseil tenu par les rats,1838
Planche de l’ouvrage Fables de La Fontaine
© Bibliothèque municipale de Lyon / Photo BM de Lyon
Le rat, châtiment divin
Avant même que le XIXe siècle ne l’accuse d’avoir propagé la peste, le rat inspirait déjà crainte et inquiétude. Animal « ravageur » s’attaquant aux réserves alimentaires, sa propension naturelle à la multitude, due à l’exceptionnelle fécondité de son espèce, donnait à ses apparitions une ampleur dramatique et transformait vite sa présence en fléau.
Nombre de récits et de légendes antiques ou médiévales traduisent cette peur instinctive où l’invasion du rat est souvent perçue comme un châtiment divin.
Rat et dévotion
À l’image de l’Apollon Sminthée de l’Antiquité grecque, de nombreux saints entretenaient
en Europe des rapports privilégiés avec les rongeurs : sainte Fina, saint Martin de Porres et surtout sainte Gertrude qui devint, dès la fin du XVe siècle et dans tout l’est de l’Europe, la patronne privilégiée des rats et des souris.
Le rat, métaphore de l’homme
Vêtu selon la mode de l’époque, doté d’un visage humain, prenant des poses d’orateur ou de politicien, le rat sert presque traditionnellement, en tant que raccourci anthropomorphique, à décrire des carences ou des défauts humains : avarice, égoïsme, cupidité, gaspillage, destruction.
Jules Chevrier et les rats
Jules Chevrier, premier directeur du musée de Chalon-sur-Saône de 1866 à 1883, était surnommé « peintre des rats » en raison de sa passion pour ces rongeurs qu’il a maintes fois peints, dessinés ou gravés.